Aussi, le voir déambuler en seule compagnie d’un sac à dos vide (si ce n’est pour le couteau de cuisine, la paire de gants épais et le deux bouteilles d’eau qu’il contenait) était parfaitement inhabituel. D’autant qu’il se situait à présent à une dizaine de kilomètres de son village, soit presque deux heures de marche, à la lisière entre Stone Belt et Nevada’s Hell.
- Enfin. Souffla-t-il, Vous m’en avez fait baver.
Il inspira longuement pour se remettre de sa randonnée, mais ne reçu pour sa peine qu’une goulée d’air chaud qui le fit grimacer. Maugréant entre ses dents, il chassa la sueur coincée dans ses sourcils avant de revêtir ses gants et d’abattre son couteau sur sa cible, faisant perler quelques gouttelettes rouges sur la lame.
Curieux, il porta son trophée à ses lèvres, et, veillant à ne pas se blesser, il croqua délicatement le morceau de chair à vif. Ses yeux s’illuminèrent devant la douceur inattendue, et il marqua un temps de pause pour apprécier à sa juste valeur sa récompense et songer aux recettes qu’il pouvait revisiter avec ce nouvel ingrédient de choix.
Il avait d’abord pensé que Sandy, l’une de ses rares amies au village, se payait sa tête lorsqu’elle lui avait dit que des arbres -ou plutôt des cactus- fruitiers poussaient dans le coin, mais il s’avérait que la mécanicienne avait dit juste. Devant lui se trouvaient une petite quinzaine de figuiers de Barbarie, dont les fruits juteux mais couverts d’épines n’attendaient plus que d’être cueillis.
Fréderick passa une petite heure à sélectionner les meilleurs fruits pour sa récolte et à les disposer avec précaution dans son sac, veillant à ne pas les écraser. Il travailla en silence, laissant son esprit divaguer sur les desserts fruités qu’il pourra bientôt proposer à la vente, et s’arrêta lorsqu’il eu fini de remplir son sac. Il essuya la lame de son couteau sur un linge accroché à sa hanche, et rangea ses affaires une fois sa soif étanchée. Il n’avait pas fait tout ce chemin pour s’évanouir au retour, après tout.
D’humeur légère malgré la chaleur abrutissante de ce milieu de journée, l’exilé s’engagea sur le chemin du retour. A mesure que ses pas l’éloignaient de Nevada’s Hell, son rythme de marche se faisait plus soutenu. Le désert de sable laissait peu à peu place au désert de pierre, rendant ses déplacements un peu plus aisés.
Son regard clair surveillait les alentours derrière ses lunettes de soleil, et il fronça les sourcils lorsqu’un éclat métallique attira son attention. Il dévia légèrement de sa course pour atteindre l’étrange artéfact qui reposait à quelques pas de l’une des bouches d’égouts qui avaient pris l’habitude d’apparaitre dans la région. Une simple petite bizarrerie locale, pas de quoi s’inquiéter… Ou en tout cas c’est ce que disaient les habitants du coin, qui avaient vu fleurir des dizaines de ces passages souterrains.
Frederick préférait les éviter, mais aujourd’hui, il y avait un drôle de boitier à côté de l’une d’elle, et il aurait été idiot de ne pas y jeter un coup d’œil. Intrigué, il s’accroupit pour y voir plus clair et attraper l’objet. Il le tourna un moment dans ses mains sans comprendre de quoi il s’agissait. Ça avait l’air cher, et neuf. Quoi que ça puisse être, il pourra sans doute en tirer un joli prix.
Il se redressa et surveilla les environs quelques instants. Personne. Ça ne pouvait pas être considéré comme du vol s’il n’y avait personne à qui le voler, pas vrai ?
Bien décidé à accepter ce petit cadeau de la providence, il l’empocha avant de reprendre sa route. Une fois de retour au village, il fera un crochet par le garage de Sandy pour lui demander si elle avait déjà vu pareil objet et ce qu’il pouvait espérer en tirer. Et puis, il rentrera chez lui pour stocker une partie des fruits, et conditionner l’autre en vue de la préparation d’une confiture qui, il en était sûr, allait faire fureur dans ses prochaines confections.